Seulement une lampe à ressort ?

Publié le 25 mai 2022 à 14:32

J’étais attablée à mon bureau en train d’essayer de trouver le flot artistique qui m’emmènerai loin de tous les tracas quotidiens. Oui je ne suis pas très différente de tout le reste du peuple humain. Le fameux flot artistique qui vous prend et vous noie pratiquement dans ses rapides. Pour moi ce flot n’est pas une douce rivière, non c’est un torrent enfoui au fond d’une gorge cachée au milieu des montagnes inextricables et inaccessibles. À chaque fois à un endroit différent, pour corser un peu plus la chose. Je mets un temps infini à le trouver et une fois tombée dedans, il m’emporte me projetant dans tous les sens et immanquablement, je ne sais plus où est le haut, où est le bas, l’air ou l’eau. Bref, c’est une belle pagaille, mon flot artistique. J’ai sans doute encore besoin de temps pour y surnager sans m’y noyer et m’y retrouver. Mais là, je cherche toujours. J’allai par ci par là, m’éparpillant, ne sachant pas où le trouver.

Je me grattais le crane par reflexe perplexe. Je poussai un soupir.

Et on me répondit.

« Pfffffffffff… ». Un soupir de réponse encore plus profond que le mien.

Je me retournai en sursautant. J’étais seule dans ma maison. Tandis que je scrutai la chambre je pris conscience que mon cœur battait la chamade.

« Je suis là… » Je sursautais de plus belle. La voix dans mon dos s’impatientait. Je fis lentement tourner ma chaise de bureau tout en m’éloignant de la voix humaine. L’effroi me glaçai.

« Toi on ne peut pas dire que tu es une lumière… pfffuit envolé l’imagination. Comment as-tu pu m’entendre de l’autre côté alors que je suis en face de toi !? »

J’observais ma lampe grise à ressort qui s’était mise à bouger et me regardais avec son ampoule qui s’allumait au rythme de ses paroles. Je n’en croyais pas mes yeux et mes pieds poussait ma chaise plus loin de cette lampe qui prenait vie. Je me frottais les yeux puis me pris la tete entre le plat de mes deux mains. Ma bouche bée ne laissait aucun bruit sortir.

Les ressorts en bas du bras articulé se tendirent redressant la lampe qui se cogna dans le mur.

« Ouille ! que c’est étroit ici ! »

Puis les ressorts se détendirent d’un coup, la lampe fit un bond de dix centimètres en avant, retombant juste au bord du bureau.

Cette fois –ci je criai : « Aaah ! mais qu’est-ce que ? ...Qu’est ce qui se passe ?? »

L’air de rien de sa voix humaine la lampe répondit :

« Je suis la lampe d’une femme qui vécut il y a longtemps. Une sorcière d’après ses pairs, de mon avis un génie surtout. Elle passait sa vie sur son bureau à mettre au point des objets tous différents, tous animés. Lorsqu’elle est morte, j’ai suivi son conseil de ne plus bouger ni parler, mais tu m’as vaincu. Ton entêtement à faire de toi une écrivaine alors que tu vois bien que n’es pas faite pour ça, est ridicule.

« Quoi, qui ? comment ça ?? »

« Tu es la digne héritière de Blancheta à mon humble avis, une créatrice d’objets surnaturels »

« Mais comment produis-tu des sons ? »

« Avec mon âme humaine. Blancheta à attacher mon âme à cet objet simple. Je pourrais meme dire simplet à mon grand dam. C’est aussi comme ça que je bouge »

« … »

« Bon… laisse pour le moment les détails. Acceptes-tu ta nouvelle vie ? je vais t’apprendre à créer des objets comme moi, et je t’assure que tu vas en voir d’autres qu’une simple lampe comme moi. »

« … »

« L’absence de réponse est une acceptation en soi donc soit, tu seras mon apprentie » La lampe hocha de sa tete lentement lui donnant un air pensif.

« J’aurai attendu longtemps, mais finalement tu ne sembles pas si mal, j’ai bien fait je pense. »

Puis, plus bas comme un peu pour elle-même : « au pire je réinitialiserai son âme et j’attendrai encore un peu… mais bon j’aimerai bien redonner le flambeau… qu’est-ce que je suis fatigué. Fatigué … »

 

C’est ainsi que de gré ou de force, je me mis à apprendre l’art d’animer des objets. Et ça s'annonce mieux que mon écriture.

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